Sommes nous capables de nous autogerer ?
Voici mot à mot la question que posée une jeune étudiante du pays, dans un forum sur facebook, il y a quelques jours. J’avoue que sur le moment je n’ai pas su lui donner d’autres arguments que ceux-ci. Je reconnais que j’aurai pu lui donner une réponse plus complète en prenant le temps de retranscrire des chiffres plus précis et des éléments plus pertinents. Mais je me suis dit qu’au final l’important serait bien de convaincre la personne avec un discours le plus simple possible plutôt que de rentrer dans une explication longue et ennuyeuse. Et du coup, Je me rends compte que pour l’instant aucune étude sérieuse n’a été réalisé sur une question comme celle-ci :
Quelles seront réellement les couts financiers de la gérance des compétences régaliennes pour la Kanaky/Nouvelle-Calédonie si ce pays devenait indépendant ? Cela pourrait permettre d’apporter un élément de persuasion décisif pour le référendum à l’issue de l’accord de Nouméa.
Réponse :
Bon voici quelques éléments, Je te dirai oui sans tergiverser. A défaut d’avoir une étude sérieuse et reconnue à ce sujet. Je me base sur des éléments qui ont su me convaincre et qui je l’espère seront te convaincre.
Nous avons une expérience indéniable en termes de gestion politique de notre pays, connu différents statuts d’autonomie jusqu’au plus importants que sont ceux issu de l’accord de Matignon- Oudinot qui nous a donné la provincialisation puis le nouveau statut issu de l’accord de Nouméa qui nous apporté une grande nouveauté, un gouvernement et un congrès votant des lois de pays. Depuis plus de 23ans des calédoniens gèrent des provinces ayant un champ d’action vaste allant du développement économique comme l’accompagnement de l’usine du nord par exemple à la mise en place de politique culturelle et sportive.
Depuis 11 ans nous gérons un gouvernement collégial qui nous permet de mettre en place des politiques publiques en termes de santé ou d’éducation. La lutte contre le chikunbunia c’est de la compétence du gouvernement de la nouvelle Calédonie tout comme le débat sur l’école calédonienne.
Nous avons de nombreuses compétences que nous gérons de manières complètements indépendantes, dans la mesure de l’adaptation au politique nationale française bien sure (nous sommes encore sous juridiction française). Nous gérons par exemple la santé comme la couverture sociale et les aides sociales depuis 1957, soit plus de 50 ans.
Nous avons un contexte et un potentiel économique capable de nous assurer un niveau de vie de pays riche dans le cas d’une indépendance. Nous sommes un des pays riches de la région pacifique avec un PIB de 5,1 milliards d’euros (en 2005).
Nous avons des richesses minières qui assurent 25 % des ressources mondiales de nickel. Nous aurons de plus en plus de recettes fiscales issues du nickel dans les années à venir avec les deux autres usines supplémentaires que sont celles du Nord et de Goro. Nous avons encore des stocks suffisant pour être exploitable sur du long terme, par exemple les gisements de prony ouest riche en latérite. Nous disposons également de 1 740 000 Km2 de zone économique exclusive riche en matières premières comme le gaz ou le pétrole.
Par contre il nous faut reconnaitre que la France fournit ¼ de notre PIB par l’entretien de ses infrastructures comme les bases militaires ou la police nationale, le paiement des ses fonctionnaires ou encore le transfert de compétences. De toutes manières disons nous bien qu’à court terme, c'est-à-dire à la fin de l’accord de Nouméa, entre 2014 et 2018, la France n’assurera plus que l’entretien fonctionnel et les salaires des structures dites régaliennes (armée, police, justice…) donc la participation de l’argent de l’état Français va inexorablement diminuer d’année en année.
Sur le volet économique toujours, il est important de prendre en compte l’importance de la fiscalité calédonienne car c’est elle qui va se substituer au financement des nouvelles compétences que nous aurons à l’indépendance. Notre fiscalité actuelle est opaque et archaïque, nous l’avons hérité de la colonisation, c’est celle d’une économie de comptoir. Bien que nous disposions de cette compétence depuis 1976, une réforme est aujourd’hui nécessaire pour obtenir plus de recettes fiscales pour le pays. Cette refonte du système qui pourrait voir le jour prochainement, en tout cas avant la fin de l’accord de Nouméa permettra de mieux appréhender les futurs dépenses de la nouvelle Calédonie.
Nous avons formés des cadres pour le pays depuis plus de 20 ans dans les domaines clés pour la nouvelle Calédonie. La mission 400 cadres puis Cadres avenirs permet l’accession des kanak et calédoniens au poste à responsabilités dans tous les secteurs. Je ne te parlerai même pas des autres étudiants calédoniens qui partent avec des dispositifs de formation comme BTF et ABS, se former en France ou au Québec.
Pour résumer je dirai que nous avons la compétence et l’expérience pour nous gérer sereinement. Et que d’un point de vue économique nous avons un contexte et des outils économiques pour le faire dans de bonnes conditions.